Poème de la semaine
On le sait on le sait, nous avons tous été des conducteurs de train dans la neige et le blé ou cosmonautes blancs, ou soldats impossibles, nous avons tous été pilotes d'un avion pour la planète mars, pompistes endimanchés, traducteurs d'airs de flûte, menuisiers hébétés, chanteurs d'opéra-mime, grands blessés, grands brûlés, grands bêtas intimidés devant une cousine aux cheveux blonds qui dorment, Don Quichotte d'un soir, harassé, fatigué, épuisé, mais au vaillant vouloir pour suivre cette étoile que nous sommes seuls à voir. Nous avons tous été baptisés au mariage, mariés en communiant, enterrés sous la plage où grandit un château, un grand jour de naissance ! On le sait, on le dit : l'été, nous avons tous eu peur des bikinis, d'une montagne haute qui pousse sous les draps, d'une grotte profonde où s'engager t'engage.Et tous nous le savons : c'était l'époque chaude des printemps inconnus, des forêts encore vierges qui ignorent l'automne, où nous étions debout, le regard vers le ciel qui cherche les Indiens et la main bien serrée dans celle de papa. Et nous voici ce soir (déjà ?), nous lisons le journal (ce matin, je volais !)assis sur les banquettes (à midi, je t'ai vue) en attendant le train (tu seras là ce soir ?) sans la neige, ni le blé.
Timotéo Serguoï
texte publié dans l'anthologie Momento Nudo, éd. L'arbre à paroles.