Poème de la semaine
Loin pas si loin dans le temps les
souris dormaient sous notre
oreiller. Le loup aussi. Elles, des
petites pour les dents de lait. Lui
plein de grandes dents plein sa
gueule. Sont toutes et lui toujours
là sous l'oreiller. Des désirs
délicats lumineux colorés et
vivaces couchés sur des fourrures
douces et grises. Ou des cauchemars
trouant la brume de nuit sans balise
ni fanal. Certes, ça vous élargit
le noir, et se peut que ça saigne.
Mais loin pas si loin dans le temps
on se débrouillait de ça. Faudrait
redemander du baume à la vendeuse
aux colifichets, laisser les
marées redémarrer, accepter de
faillir. Vouloir graver l'amour
dans le cristal, ça le congèle.
Mieux vaut retourner dormir près
des souris et des louves, avec
nos restes d'enfance inattendus,
hirsutes, désordonnés. Y retrouver
les envies. Eteindre un moment nos
casques qui tonitruent des musiques
à prise rapide. Peut-être entendre
enfin ceux couchés au ras des
poussières, et qu'on entend
toujours si mal, proclamer à bas
bruit la tourmente, la leur. Aussi
la nôtre bien sûr. Et peut-être
alors d'un an l'autre on se
mettrait à affronter la poussière
pour eux. Pour nous.
BONNE ANNEE 2014
Philippe Longchamp, inédit (merci Philippe!)
et pour info, d'autres de ses poèmes-voeux -
inédits aussi - de quelques années passées,
paraîtront dans le prochain numéro de la revue
N4728 (en janvier 2014)...